Depuis 2010, Agnès DEWITTE enseigne la démarche
Chemins d’Acteur dans le cursus
des acteurs et des metteurs en scène
à l’ENSATT à Lyon.
(Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre)
En Novembre 2017 elle a représenté cette école au
1er Forum international STA à Shanghai,
réunissant une vingtaine d’intervenants internationaux
(USA, Chine, Russie, France, Italie, Allemagne, Australie …).
Elle y a présenté la démarche CHEMINS D’ACTEUR
et sa façon de l’aborder dans cette école
Shanghai 1er Forum international STA formation de l’acteur
Texte de la prise de parole Agnès Dewitte
« Je représente ici l’Ensatt, Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre, dirigée par Thierry Pariente depuis 2009. C’est une école née à Paris il y a 75 ans, qui a su se délocaliser dans la 2e métropole française, Lyon. Elle a l’originalité de proposer à ses élèves les départements nécessaires à la formation de tous les métiers du théâtre : écrivains dramaturges, acteurs, metteurs en scène, concepteurs lumière, les concepteurs son, concepteurs-costume, costumiers-coupeurs, costumiers-régie de production, scénographes, administrateurs, directeurs techniques. L’entrée se fait sur concours, sur dossier. Le cursus pour la majeure partie des départements est de trois ans. L’Ecole est implantée à Lyon depuis vingt ans, sur la colline de Fourvière, dans un milieu boisé. Elle dispose de salles de travail, de deux salles de représentations modulables et d’une salle de spectacle en gradins.
L’ENSATT dispense également de la formation continue, des stages courts et ouvre des formations diplômantes dans des domaines variés du spectacle.
En ce qui concerne le département Acteur à l’ENSATT, lors de leurs 1e et 2e année, les élèves acteurs bénéficient de cours d’interprétation, d’improvisation, de danse, de
dramaturgie, de chant, d’entraînement corporel, de phonation, de clown, de marionnettes, de théâtre en anglais, de travail devant la caméra, de travail radiophonique… L’université Lyon 3 est
partenaire de l’Ecole, notamment pour l’enseignement de l’histoire du théâtre, de la dramaturgie, et ce au cours des trois années.
Pendant ces deux premières années, les élèves Acteurs ne partagent leurs travaux qu’en public interne à l’école.
Les élèves des divers départements se rencontrent annuellement lors d’événements ponctuels.
En première année, un Laboratoire de recherche réunit tous les départements.
En 2e année les Essais au nombre de huit, sont des tentatives artistiques, des gestes brefs, ébauchés en urgence par les étudiants de tous les départements pédagogiques : tout étudiant ou étudiante de chaque département peut déposer un projet d’Essai, dont il sera le porteur auprès de ses camarades.
Chaque élève metteur en scène conduit des Hypothèses en première et deuxième année.
Enfin, les étudiants de 3e année, tous départements confondus, participent à deux ou trois spectacles publics. Des metteurs en scène de renommée nationale et internationale sont invités à faire œuvre de transmission en menant un travail spécifique avec chaque métier et à créer un spectacle dans les mêmes conditions que ceux qu’ils dirigent et animent sur les scènes de théâtre ou avec leurs compagnies. Pour une cinquantaine d’étudiants des différents départements, ce sont six semaines de répétitions et deux semaines de représentations en public. La venue et la présence de ce metteur en scène invité constituent bel et bien un événement dans l’école, et une nouvelle et ultime étape pédagogique pour les étudiants de 3e année avant leur sortie. Parmi ces metteurs en scène invités, nommons Matthias Langhoff, Arpad Schilling, Jean Pierre Vincent, Dominique Pitoiset, Alain Françon, Franck Vercruyssen (TG STAN), Daniel Larrieu, Aurélien Bory… pour n’en choisir que huit récents.
Depuis 1979, je fais partie d’une compagnie régionale de théâtre près de Rouen (Normandie), La Comédie Errante, dirigée par Bob Villette acteur metteur en scène, créateur d’une démarche novatrice de l’acteur, nommée « Chemins d’Acteur ». C’est une démarche évolutive, dont je me sers depuis le début dans mon métier de comédienne. Depuis 1996, je partage cette démarche sur la Normandie avec des élèves amateurs, tant enfants qu’adultes, et depuis 2008 avec des élèves en devenir professionnel à l‘Ensatt Lyon. C’est donc une expérience de comédienne et une expérience de pédagogue, tant sur un plan régional que sur un plan national, qui m’animent.
Simone Amouyal, assistante de Roger Planchon, elle-même metteur en scène, a suivi mon parcours depuis son commencement. En 2008, alors directrice des études à l’ENSATT Lyon, elle m’a sollicitée pour partager mon travail d’actrice avec les élèves dans le département Acteur.
J’interviens donc, de même que d’autres intervenants, dans la formation de l’Acteur.
Quelques mots pour expliciter la démarche « Chemins d’Acteur ».
Avant toute chose il est important d’en noter l'orthographe : le mot « chemin » est au pluriel et le mot « acteur » au singulier.
Il s'agit donc bien d'une proposition de recherche de différents chemins pour chaque acteur et non pas de définir un seul chemin pour tous les acteurs…
Qui dit chemin dit aussi but à atteindre, ou pour le moins, direction à prendre.
On s'intéresse donc tout d'abord au but à atteindre.
Très sommairement résumé, la majeure partie du temps, lors des créations théâtrales, le principe de la catharsis d’Aristote reste l'objectif poursuivi majoritairement. C’est-à-dire imiter la vie, reconstituer sur une scène, le plus fidèlement possible, l’œuvre d'un auteur dramatique et donner ainsi au spectateur l'occasion de s'identifier, de vivre des émotions par procuration, par le truchement des acteurs.
Ceci considéré, on peut convenir qu’aujourd’hui, “l’outil cinéma” remplit parfaitement cet objectif.
Alors, avant de considérer le théâtre comme révolu, on peut s'attarder à l'une des spécificités de l'art théâtral, qui est la rencontre physique d'acteurs et de spectateurs, qui vont vivre ensemble le temps d'un spectacle, dans un même temps, dans un même lieu.
Quelle peut être alors, la nature de la relation établie entre acteur et spectateur ?
Si le spectateur est placé devant des acteurs, qui vivent à sa place les émotions voulues par l’auteur de l'œuvre, il est alors, cantonné à une attitude passive.
Imaginer un partage entre le spectateur et l'acteur, c'est avant tout considérer le spectateur comme un partenaire à part entière de l'acteur, qui va, avec lui, comprendre les éléments de l’œuvre, les éléments qui constituent un événement, une émotion. Ceci, bien sûr, n'est pas sans rappeler Bertolt Brecht qui préconisait de s'intéresser aux causes et au déroulement d’un événement plutôt qu’à son issue. Mais Brecht conservait la fonction didactique de l’acteur envers le spectateur.
Atteindre cet objectif d’un partenariat entre l’acteur et le spectateur nécessite de considérer différemment le travail de l'acteur. A commencer par son positionnement par rapport à la salle : il ne s'agit plus pour l'acteur d'habiter le lieu scénique face au lieu public, il s'agit maintenant, même en restant sur scène, “d'habiter” l'ensemble du lieu théâtral scène et salle comprises. L'acteur ne se considère plus comme devant un public mais comme étant UN parmi tous, dans le lieu, à égalité avec chacun des spectateurs et des acteurs présents dans le lieu. Il n'est plus l'émetteur qui depuis la scène projette son savoir sur le spectateur en face, il est aussi désormais celui qui reçoit les informations de la salle.
La démarche théâtrale française reste bloquée sur le phénomène appelé « 4ème mur », comme si un mur de verre séparait ceux qui sont sur scène, les acteurs, de ceux qui sont dans la salle, les spectateurs. Dans cette fiction architecturale d’un 4e mur virtuel, les acteurs apprennent alors à créer leur monde, leur fiction, créer un personnage, s’intéressent au fin fond de leur moi intérieur.
Nous allons donc commencer par pousser ce 4e mur virtuel au fond de la salle, derrière les spectateurs, là où l’architecte du bâtiment l’a placé, en fait.
Le jeune élève acteur, quand il arrive à l’Ensatt, est imprégné, formaté, depuis des années déjà à cette méthode de la reproduction, de la reconstitution, de l’introspection, souvent basé sur Stanislavski (souvent sans le savoir ou le comprendre et a fortiori le maîtriser).
La démarche « Chemins d’Acteur » propose à l’acteur une approche différente de son travail : l’acteur ne va plus chercher en soi-même mais chercher autour de soi, il va devenir avant tout un récepteur, en parfaite conscience de ce qui l’entoure, il va s’éloigner de la fonction ancestrale d’«émetteur» qui lui a été dévolue jusqu’ici. L’acteur ne va plus penser en termes d’incarnation ou de personnage, il va penser en termes d’objectif du spectacle. Il va créer le lien avec chaque spectateur et ne plus lâcher ce lien.
Tout ceci au final va rendre l’acteur plus autonome dans son travail et plus ouvert, plus réceptif dans le temps de la rencontre artistique.
« Chemins d’Acteur » a cet objectif clair : le comédien s’interdit la reconstitution, la tranche de vie, la fiction. Il utilise 100% de son énergie à rester dans la même réalité que les autres personnes présentes, à recevoir de ce qui l’entoure, à y réagir. La pièce – si pièce ou texte il y a – n’est plus une entité finie, elle évolue au fil de la représentation, au fil de chaque représentation, parce que les spectateurs ne sont pas les mêmes que la veille, parce que les comédiens ont vécu des choses différentes dans la journée, parce que la météo n’est pas la même…
Tout cela demande énormément d’énergie à l’acteur et nécessite de sa part une préparation physique et psychique. Il ne s’agit pas d’un training musculaire dans l’absolu. Il ne s’agit pas de développer un corps d’athlète. Mais l’acteur doit reconnaître comment son corps et sa pensée s’inscrivent dans l’ensemble du lieu et il doit faire le nécessaire physiquement pour développer la respiration, chauffer les muscles, animer la vivacité, faire que le corps colle aux murs de la salle, devenir partie intégrante du lieu. Il doit s’ajuster au lieu, comme deux pièces d’un mécanisme d’horlogerie. Alors, et alors seulement, la pensée englobera toute personne présente dans le lieu, aussi éloignée soit-elle de l’acteur.
Le théâtre n’est plus le lieu de la reconstitution, il redevient un lieu d’échanges.
Cela ne veut pas dire que les spectateurs, les techniciens, vont prendre la parole, que le texte sera improvisé. Le texte sera respecté, la mise en scène sera respectée, les « codes du théâtre » seront respectés, et pourtant tout sera différent.
Je n’ai jamais parlé de cette démarche « Chemins d’acteur » aux metteurs en scène avec lesquels j’ai travaillé. Mais dernièrement, l’un d’eux faisait remarquer, que quand il me voit travailler, il s’interroge : il semblerait que je fasse pareil que les autres acteurs et pourtant c’est différent. Je réponds à cela, que mon objectif est différent.
Avec cette démarche, des outils précis sont donnés à l’acteur pour qu’à chaque instant, son énergie soit orientée vers l’instant présent, l’échange. Segmentations du geste, de la parole, du regard, de la pensée, axes de l’espace, enjeux, propos, sont des termes qui livrés ici ne disent pas grand-chose, mais qui développés en séances de travail avec l’acteur lui permettent à chaque seconde de savoir où il en est de la réalité, de sa perception, d’utiliser à bon escient les divers langages dont il dispose, de structurer l’espace qui l’entoure.
Je rencontre tout d’abord ces élèves lors du 1er tour du concours d’entrée à l’Ensatt. Ils sont plusieurs centaines, entre 18 et 25 ans, qui en moins de 10 minutes doivent convaincre un jury de 7 ou 8 membres. Puis, de tous les candidats rencontrés, il n’en reste que 30 au 2e tour de concours. Pendant 4 séances, je leur donne des règles précises, des outils concrets à respecter, empruntés à « Chemins d’Acteur ». Je teste ainsi leur capacité à remettre en question des convictions, leur souhait de le faire, leur souplesse à regarder le théâtre sous un autre angle. A la fin de ce stage, sur les 30 candidats il ne reste que 12 élèves acteurs, 6 hommes et 6 femmes, qui constituent l’équipe de 1e année.
Lors de la première année, nous abordons de front l’objectif de cette démarche « Chemins d’Acteur ». Des outils leur sont donnés, développés, expliqués : à quoi ils servent, pourquoi sont-ils nécessaires. Ces outils basiques se heurtent la plupart du temps avec ce que l’acteur a appris jusqu’à présent.
J’essaie avec les élèves de trouver le chemin, adéquat pour chacun, pour changer leur pratique, leur regard sur le théâtre, pour envisager un autre comportement. Chacun est différent, le chemin n’est pas le même. Il faut donc essayer des exercices divers. Ils fonctionnent ou ne fonctionnent pas, on en change, on en invente.
Le rythme de travail de l’Ecole, les amène souvent à un entre-soi qui les coupe du concret. Je demande à ces jeunes acteurs, de sortir de l’école, de ne pas se couper du réel, de la vie quotidienne. Il nous arrive d’aller travailler dehors, qu’il vente ou qu’il neige, d’aller faire une partie de basket, d’aller au Théâtre des Minimes, théâtre romain proche de l’école. Là, nous rencontrons des gens, nous discutons avec eux, nous échangeons des passes de ballon, … Les murs de la salle de travail sont disponibles pour afficher tout ce qu’ils veulent partager, avec ou sans rapport direct avec le travail en cours : articles, photos, presse … Mais aussi musique… ou la dernière lettre reçue du service des impôts…
Cette forme de questionnement et d’affichage/partage continue l’année suivante.
Lors de la 2e année, nous n’en sommes plus à la découverte de la démarche, de ses outils. Il s’agit de la mettre en pratique : un texte est adapté pour l’équipe, qui est constituée de 13 ou 16 membres : les acteurs de la promotion, quelque éclairagiste, les élèves metteurs en scène.
Dès 2010, la co-directrice du département Lumière à l’Ensatt, a été intéressée par la démarche. Ainsi, de façon encore expérimentale, quelques élèves s’intègrent à l’équipe des acteurs 2e année. L’échange est double. Tous sont acteurs, mais les élèves lumière essaient aussi des éclairages et partagent avec les élèves acteurs leur pratique d’éclairagiste. Il s’agit d’un partenariat.
De même, en 2015, le directeur adjoint du département mise en scène, a estimé que cette démarche d’acteur présentait un intérêt à faire partie du cursus metteur en scène. Le but, là aussi, est d’apprendre aux élèves metteurs en scène, dès leur entrée dans l’école, à identifier les outils propres à l’acteur, à ne pas les ignorer, à leur donner leur place dans le travail de construction d’un spectacle. Ils apprennent à parler à un acteur, comme à un partenaire et pas comme à un exécutant. Les metteurs en scène, pendant ces sessions de travail ensemble, laissent de côté leur fonction de metteur en scène et deviennent acteurs à part entière.
De même que pour le cursus acteurs, j’interviens dans le cursus metteur en scène au moment du concours, lors de la 1e année et lors de la 2e année.
Nous travaillons pendant cette session 2ème année à partir d’un texte entier. Au bout de 4 semaines, il est proposé en rencontre publique, interne à l’école. Il ne s’agit pas de créer un spectacle, mais nous essayons de mettre en pratique « Chemins d’Acteur » comme on le ferait si on était engagés sur un spectacle en tant qu’acteur, en essayant de mettre à jour par ce biais les relations humaines, l’essai et surtout la propre autonomie de l’acteur. L’acteur apprend à travailler dans un temps court, à être autonome, à ne pas attendre la becquée, à savoir faire un auto-bilan de son travail de répétition ou de représentation, et à en envisager la suite.
Ce sont donc trois départements, Acteur, Metteurs en scène, Lumière, avec lesquels j’ai le plaisir de partager cette expérience.
Les élèves acteurs sont parfois déstabilisés par la dualité qui leur semble exister entre « Chemins d’Acteur » et les autres approches faites par les autres intervenants dans l’Ecole. Les autres démarches leur semblent être en antagonisme avec ce que nous faisons. Ces élèves ne savent plus s’ils doivent répondre à l’attente de l’intervenant ou du metteur en scène d’un autre atelier, ou bien rester fidèles à notre démarche. Je leur réponds qu’ils doivent faire les deux. Lors d’une création, le metteur en scène dans ses demandes, dit à l’acteur le point d’arrivée qu’il veut obtenir, mais seul l’acteur saura comment y parvenir, quel chemin emprunter. L’acteur n’a pas à appliquer une consigne, -ce serait généralement une première lecture que n’importe qui pourrait faire -, il n’a pas à aller en ligne droite ; mais par des segments d’orientations diverses, il doit arriver au point demandé. Chercher les chemins par lesquels il va répondre à la demande. Et il aura cette gymnastique à faire tout au long de sa carrière.
Tout ceci, aligné ici, entre nous, de façon abrupte, pourrait paraître très austère et dénué d’humour, quasi monastique. Il n’en est rien dans les faits et les séances sont le plus souvent joyeuses. Parfois, des élèves remarquent – et ce n’est pas négatif – « j’ai l’impression de faire des mathématiques ! ».
Quand j’ai accepté de venir enseigner Chemins d’acteur à l’Ensatt, ma décision a été emportée par l’urgence de l’instant. Depuis vingt ans, La Comédie Errante développe la démarche « Chemins d’Acteur », sur la Normandie, auprès d’adultes, certes, mais aussi auprès d’enfants -voire même de très jeunes enfants, en crèches. Le résultat est spectaculaire. Il m’a semblé urgent dans les années qui viendraient, d’étendre cette démarche, de la faire connaître, de l’essaimer. C’est peut-être très présomptueux de ma part. Mais j’ai l’espoir que ces jeunes comédiens formés à une réflexion autre, à un théâtre basé sur l’échange et non plus sur l’introspection ou l’éblouissement d’une personnalité, pourront eux-mêmes générer petit à petit un théâtre différent.
« Chemins d’Acteur » est une démarche évolutive : elle est mise en recherche par Bob Villette dans son atelier, réunissant amateurs et professionnels à Cléon (Normandie), elle est mise en travail avec les comédiens de La Comédie Errante lors des créations de spectacles. Ce que je partage ici à l’Ensatt est à chaque fois un instant T de cette démarche.
Pendant ces centaines d’heures passées ensemble à l’Ensatt, les élèves et moi, nous avons appris à nous servir d’outils, qui constituent pour l’acteur une grille d’évaluation de chaque instant de son travail : est-il bien ancré dans l’instant présent ? est-il à la réception de toutes les personnes présentes dans le lieu ? Tous partenaires à égalité ? est-il bien dans la germination d’interrogations et non dans une reconstitution, ou une émotion personnelle ? C’est une grille d’évaluation qui permet à l’acteur un auto-bilan, qu’il aura appris à faire avec les points négatifs et les points positifs.
Pendant leur 3e année, après leur sortie d’école, je continue à échanger avec ces élèves, à leur demande. Des points récurrents émanent de leur expérience ; certaines choses dites, certains outils donnés, leur permettent quelques années plus tard, dans la vie active de se sortir aussi de situations difficiles : metteur en scène absent des répétitions, conflits internes, représentations dans des lieux ignorés du théâtre …
Dans sa vie professionnelle, au sein d’une distribution, au cœur de la création d’un spectacle, cette grille d’évaluation est à l’acteur un outil essentiel pour bâtir.
Ce qui nous réunit ici aujourd’hui est sans aucun doute un même but, un même rêve. Nous ne le verrons probablement pas, mais nous en aurons été les ferments : faire que le théâtre de demain soit un art ouvert à tous, accessible à tous, que chacun puisse sortir d’une salle de spectacle, un point d’interrogation suspendu au-dessus de la tête, avec cette sensation unique : que l’acteur l’attendait, lui, et lui parlait, à lui, et à lui seul. »